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Petite épistémologie de la créativité - première partie

(Sous-titre provisoire: De la contrainte nécessaire.) Une des choses qui font de l’Homme un être vraiment étonnant est sa capacité à in...

jeudi 2 novembre 2017

Sortie au Lac

Bien que je me sois levée tôt ce matin, je n'étais pas très en forme. Sûrement flottante dans le sillage brumeux de la veille, où j’avais bu un peu de vin et m’étais couchée tard. J'ai vraiment du me forcer pour me préparer et rejoindre Virginie. Mais j'avais fait des souhaits à mon réveil pour obtenir une aide quelle qu'elle soit de mes guides invisibles, et l'invitation au Lac était clairement cette aide que j'avais sollicitée. Il était hors de question de décliner cette proposition.
Donc j'ai enfilé un pantalon de sport, un t-shirt, un sweet, fourré deux trois affaires dans un sac à dos et je suis montée rejoindre Virginie chez elle pour 13h.
Je marchais lentement comme si j'étais vidée de toute énergie, ce qui était de toute évidence le cas, et je m'observais ainsi, avec beaucoup de douceur et une pointe de dérision: "ohh la pôoovre choupinette, comme elle est petite dans ce vaste monde... Bouh comme c'est dur pour elle ..." et je rigolais de moi car je réalisais combien tout était simple et magnifique, combien il était agréable de marcher paisiblement sous le doux ciel de midi chauffé par un soleil généreux.
Je me réjouissais d'aller voguer sur le lac. L'air extérieur me guérissait à chaque pas.

Je suis arrivée chez Virginie et nous avons pris un café ensemble accompagné de Gingembre confit, de quoi redonner un peu d'énergie au corps. Du moins une illusion d'énergie, ce qui revient au même. Et puis nous avons chargé le canoë gonflable dans la voiture et nous sommes chargées nous-mêmes dans le véhicule.

Virginie aussi était dans une drôle d'humeur, avec des rêves étranges, des synchronicités perturbantes, des insomnies, des maux de tête, bref... Le lac était une nécessité tant pour l'une que pour l'autre, et nous étions ravies de pouvoir partager cela ensemble car nous sommes toutes les deux assez sportives (hum hum^^) et n'avons pas beaucoup de gens de nos entourages réciproques qui soient partant pour nous accompagner dans nos pulsions de nature.

Donc on apprécie de partager ces tranches de vie ensemble.
On s'est garée au Grand port, tout au bout du grand port, près de la petite plateforme rose au bout d'une jetée, où je viens faire du Qi gong de temps en temps.
On a gonflé le bateau sur un débarcadère à proximité, puis tout chargé à bord (surtout un thermos de tisane de murier ainsi que quelques fringues chaudes dans un sac étanche) et on s'est mise à l'eau en relevant le bas de nos pantalons.




C'est là que ça a commencé à devenir drôle, même si on avait déjà bien rigolé avant cela (car j'ai beaucoup d'humour).

L'idée - tout à fait réalisable de prime abord- était de traverser le lac pour approcher la côte sauvage. Je l'avais déjà fait en canoë ...
Et là, impossible de tenir un cap. Impossible. On ramait en cadence, attentives à l'angle de pénétration de la rame dans l'eau, à notre position l'une par rapport à l'autre.... le canoë tournait en rond....
C'était surréaliste.
On s'est battu contre l'adversité des forces de la nature, en pagayant trois coups à gauche puis un à droite... puis deux à droite, un à gauche... trois à droite, quatre à gauche... puis, épuisées, après avoir constaté qu'on faisait du surplace, on a revu notre objectif à la baisse et on s'est rabattu sur une plage sauvage à... 10 mètres de notre position. Il n'a pas été simple de l'atteindre.



Arrivée à proximité de la plage, un peu isolées, nous avons rentré les rames et décidé de nous laisser porter par le flux, puisque apparemment on s'évertuait en vain à aller dans une direction qui ne voulait pas de nous.
On s'est détendue sur le bateau, laissant des doigts traîner à la surface de l'eau, à siroter notre tisane, se faire dorer par le soleil, et dériver avec silence et douceur sur l'eau divine. Quelle joie alors avons-nous ressenti, quelle paix, quel bien-être! On était libre. On savourait l'instant présent qui saisissait chacune des cellules de notre corps pour leur dire: " Réveille-toi, petite cellule, réveillez-vous! Vous êtes en Vie, ici et maintenant! Allez debout !".
Plus rien ne nous préoccupait. On était détendue, avachie un peu l'une sur l'autre, à écouter le clapotis du lac, les battements d'ailes de quelques oiseaux qui s'envolaient, et à rire aussi.

C'était tellement bon de lâcher tout objectif, de se laisser dériver, de se détendre, de profiter d'être sur l'eau, tout simplement, sans aller nulle part. On a bien vite fait le lien avec la Vie, et compris le message que cette sortie en eau vive nous enseignait. Toujours là, bienveillant, ce message de Lâcher, s'abandonner, pour Etre, au présent, au cœur de la vie de la nature, et la laisser entrer en nous pour nous remplir de son énergie. Nous guérir.

C'était une bénédiction et je bénis le Lac pour l'Amour qu'il déploie.

Après une bonne heure à la dérive, nous avons estimé judicieux de commencer à pagayer un peu pour nous rapprocher du débarcadère qui finalement s'était bien éloigné de nous.
On s'est bien concentré et nous sommes parvenues à destination de façon presque honorable... et complètement trempées. Sans pantalon de rechange... Le froid était vraiment saisissant une fois arrivées à terre car le soleil était passé de l'autre côté de la montagne et l'eau, eh bien, n'était pas chaude.
Je n'ai pas trop hésité à me mettre en culotte et à virer mes fringues pour m'envelopper dans une serviette assez microscopique, et Virginie a fait de même, si bien que nous avions fière allure sur le chemin qui menait à la voiture. Et sur le chemin qui menait de la voiture à chez moi. En serviette dans la rue. J'ai beaucoup rigolé et Virginie aussi.
Ca nous a fait beaucoup de bien de nous retrouver pour partager en toute complicité et toute confiance, et en toute belle amitié, cette douce dérive existentielle à la surface de l'eau vive.

Voilà. Je souhaitais partager cette petite tranche de vie. Avec légèreté et profondeur.

Vive la nature, vive l'amour.
Y revenir.
Y revenir encore et toujours.
C'est elle qui nous sauve de nous-mêmes à chaque fois qu'on s'en remet à elle.
La mer, la montagne....
Y revenir et s'en remettre.





lundi 15 mai 2017

Kambo Kambo Kambo Hey

Je propose dans cet article un témoignage personnel sur une expérience chamanique. Je n'ai encore pas parlé sur ce blog des dernières avancées de mon parcours, et de ma rencontre avec le chamanisme ( de tradition amazonienne et celtique) mais cela viendra en temps voulu. Voici cependant un petit texte qui évoque le travail de tradition amazonienne, que chacun appréciera à l'aune de sa propre lumière.

« KAMBO KAMBO KAMBO HEY »

Cérémonie Grand-Mère, mai 2016, Suisse.


Quelques dizaines de minutes après le début de la cérémonie, la plante s'est manifestée. C'était ma deuxième cérémonie. La première avait été.... très rude. Mais 6 mois plus tard, la Plante m'avait rappelée...


Les lianes d'ayahuasca se sont écartées de part et d’autre d’un large sentier qui menait tout droit au pied d’une immense grenouille. Le gros animal avait un léger sourire énigmatique mais rien de vraiment menaçant. Au contraire, elle inspirait confiance et protection. Je me retournai pour chercher Grand-mère et tenter de négocier avec elle : «  Une prochaine fois… Laisse-moi le temps de réfléchir….S’il te plaît » mais elle me tournait le dos et ne voulait rien entendre. C’était comme si elle n’était pas là, tout en étant totalement présente. Les lianes étaient immobiles, écartées, me laissant seule face à la Grenouille. Seule face à moi-même pendant les 6 bonnes heures que dura la cérémonie. Je n’avais pas le choix, d’une certaine façon. Grand-mère n’avait absolument rien d’autre à me dire, son message était catégorique et d’une clarté affolante.

Il faut savoir que ce qu'on appelle "La grenouille", ou Kambo, n'a rien de très attrayant de prime abord. Il s'agit d'un rituel chamanique de purge profonde, qu'on peut comparer à une gastro carabinée fulgurante...
Seulement, cette médecine sacrée issue d'une sécrétion de grenouille est intimement liée à la Plante amazonienne. Si la première est de nature Yang, physique et non psychotrope, la seconde est de nature Yin et enthéogène. L'une et l'autre se complètent et se renforcent.
Jamais je n'aurais eu le courage de faire Kambo si la Plante ne m'avait pas "personnellement" invitée à le faire... Pour mon plus grand bien.

J'étais venue voir la Plante pour bénéficier de sa sagesse, pour qu’elle m’aide dans un moment de grande confusion. Et je n’aimais pas du tout ce qu’elle me montrait en l'instant. J’avais peur. Vraiment très peur de faire Kambo, car comme toute personne sensée, je n'avais pas envie de me rendre malade comme la Grenouille amène à l'être... temporairement. Au jour d'aujourd'hui, plus d'un an plus tard, j'ai fait 9 kambo et plusieurs cérémonies Grand-mère, et pas loin d'une quinzaine de purges au Tabac, qui sont encore autre chose... Mais revenons au début, à cette cérémonie du mois de mai 2016 dans les alpes Suisses.

Pendant des heures, la Plante ne me montra que la Grenouille. Comme si je devais passer par là nécessairement. Le débat en moi a alors été rude. Car quand on prend la Plante, on reste conscient de tout, alors même que notre conscience s'élargit et que l'on rentre en connexion avec d'autres plans de réalité. On reste soi, comme au volant d'un véhicule qui sort d'un chemin tout tracé, propulsé dans un monde inconnu.
Là, le véhicule était à l'arrêt au pied de cette énorme grenouille totem.

« Si je veux m’en sortir, il faut que je suive le message de la plante… Il est trop clair pour que je doute de sa signification… Je ne peux pas ne pas y aller. C’est impossible. Je dois y aller. Je dois y aller. Je dois y aller. Je dois y aller…Faire la grenouille ? Non, je ne peux pas. Ahh ! Je suis coincée… Par où aller… Ai-je confiance dans la plante ? … Oui.  Est-ce que je veux m’en sortir ? … Oui. Est-ce que je suis prête à en crever ? Honnêtement ?. (j'avais vraiment peur de la grenouille)... OUI. J’ai confiance dans la nature, j’ai confiance dans les arbres, j’ai confiance dans la tradition et la sagesse des peuples premiers, et si je me trompe, et bien je préfère mourir. Il n’y a donc rien à craindre. Je vais faire la Grenouille. Je vais faire la Grenouille… Je vais faire la Grenouille !!!... Il le faut. Il le faut. Il le faut. Au secours. Non ? Personne ? Ahh… !! Je vais faire la grenouille………»

C’est ainsi que j’ai fait mon premier kambo il y a un an, gentiment poussée par la Grand-mère. C’est ainsi que j’ai fait mon premier cycle de trois kambos, espacés de trois ou quatre semaines chacun, et pendant les six, huit semaines du cycle ( un kambo par mois), la Grenouille s’est imposée dans mon quotidien de bien des manières, pour me révéler ce qu’elle seule sait révéler.
*
Je vis dans une jolie région montagneuse et je vais régulièrement marcher seule en forêt. J’aime grimper surtout. J’adore ça. Je grimpe aussi beaucoup à vélo, des côtes interminables dont je viens à bout lentement mais sûrement. Par ailleurs, de temps en temps, je me promène en ville le soir, juste pour penser et m’aérer. Je crois que la Grenouille, une fois en moi, a vu ces choses et a dû se dire : «  C’est intéressant… On va aller voir ce qu’on peut faire par là… ».

Un soir, alors que la nuit était franchement tombée, j’ai eu une très très forte envie de me promener. Je chausse de jolis escarpins à talons hauts dans lesquels, heureusement, je suis à l’aise. Je pars sans téléphone, ni sac, ni rien, les mains dans les poches. Je déambule au hasard, je m’éloigne du centre ville. Je m’éloigne des lumières artificielles. Après une demi-heure, sans savoir comment je suis arrivée là, je réalise que je suis au milieu d’une prairie et je distingue au loin les ombres d’un bosquet. J’avance sans hésiter, comme si j’étais happée par ce sous-bois. Un grillage d’un bon mètre de haut s’interpose soudain entre le bois et moi et, le plus normalement du monde, me voilà en train de l’escalader avec mes chaussures à talons, avant d’entrer dans le bois où règne l’obscurité la plus totale. Je devine à peine le sentier et je le suis. J’ai le cœur qui bat fort et je suis très attentive à tout ce qui se passe. Je continue. Je progresse lentement, j’assure mon pas dans le noir. Je ressors du bois par je ne sais quel côté et je me retrouve entourée de ravins, de ronces, de barbelés, de grillages et je vois la ville qui s’étend en contrebas. Non, je ne ferai pas demi-tour. Je vais me frayer un chemin, poussée par quelque chose en moi, une certitude, une petite lumière de confiance. C’est ainsi que j’ai crapahuté, escaladé, dégringolé, traversé, monté, descendu à travers les jardins des petits hameaux bourgeois du dessus de la ville, entre terrains en friches et propriétés privées cernées de grilles, sans crainte mais haletante, la cheville moyennement sûre, heureuse comme tout,  enivrée par la sensation de liberté que me procurait cette drôle d’aventure.

En rentrant chez moi, il m’a fallu un certain temps pour de réaliser ce qui s’était passé. Cette sortie avait été extraordinaire. Je m’étais sentie tellement vivante et libre. Cet appel de la nature, du noir, l’absence de peur, la confiance dans tout ce qui m’entourait, la présence des arbres indistincts. La seule chose qui m’aurait terrifiée aurait été de rencontrer une personne, qui elle seule aurait pu me faire du mal, et encore, mais en dehors de cela, il n’y avait absolument rien  à craindre de la vie.
A chaque fois que j’envisageais de faire une course en ville, la grenouille m’a détourné de mon chemin et je me suis retrouvée dans tous les endroits verts à des kilomètres à la ronde. Si bien qu’au bout de quelques jours, j’ai définitivement troqué mes talons contre une paire de basket, puisque de toute évidence, je ne maitrisais plus mes itinéraires. Et j’adorais cela.

Une autre fois, peu avant la troisième grenouille, j’ai fait une sortie à vélo qui restera gravée à jamais dans ma mémoire. Un coup de notre animal adoré…
Ce jour-là, je me sentais sans trop d’énergie mais j’avais envie de faire un tour à vélo, quelques kilomètres sur du plat, histoire de pédaler un peu sans trop forcer. Il était environ 16 h, ce qui me laissait 2 bonnes heures pour profiter, avant que la nuit ne tombe. Trois heures maximum… avant de rentrer me faire une soirée cocooning devant un bon film.

Je pédale et je sens en effet que je manque de jus. Je me fais dépasser par des petits vieux très déterminés qui ne sont pas là pour regarder le paysage. J’y vais tranquille. Encore une fois, je me laisse guider, je m’éloigne… Je longe une grosse montagne très imposante qui reste dans mon champ de vision pendant quelques paires de kilomètres. Et puis, à un moment, je tourne en direction de ladite montagne. Un panneau affiche «  Col de l’épine 16 km »**. Et ça commence à monter. «  Bon, je monte juste un peu, pour dire que j’ai grimpé, et je fais demi-tour… C’est vraiment pas le jour et je n’ai pas le temps. »

Après une interminable grimpette assez éprouvante, je me retrouve au col et je n’ai pas envie de redescendre. Je suis exaltée, fière, j’en veux plus ! Je pars alors par un petit chemin après avoir regardé un plan et estimé que par là, je devrais finir par rejoindre ma ville… en deux heures.

Sauf que le chemin que j’ai pris est très escarpé et qu’en VTT, c’est galère. Au rythme auquel je vais, il va me falloir 4 heures. Et la nuit va bientôt tomber. Soit je fais demi tour et tout va bien, soit… je prends ce petit sentier, juste là, qui descend beaucoup… Il descend du bon côté de la montagne, je ne risque donc pas de me perdre…

Etrangement, je n’ai pas hésité longtemps. Et me voilà partie dans la pente étroite sans aucune autre certitude. Je descends franchement un gros dénivelé que je sais impossible à remonter. Je suis confiante mais très concentrée. Le vélo est vraiment pas simple à manœuvrer dans ce ravin. Et puis le chemin s’arrête et je me retrouve au milieu du ravin, presque déséquilibrée tant le sol penche, entre des arbres à perte de vue. La nuit commence à tomber, il me reste une demi-heure de visibilité. Je sais qu’il faut juste continuer à descendre et lire le terrain, continuer, continuer, continuer jusqu’en bas car je finirais bien, à force de descendre, par être en bas. La pente est impraticable à vélo, et le tenir à la main est vraiment pas évident. Pourtant, ça passe. Je tiens. Je descends. La voie s’ouvre d’elle-même et je n’ai pas peur. Je ne voie plus le sol et les arbres sont maintenant des ombres. Je descends cet interminable ravin, et en même je m’arrête pour savourer l’instant. Je me sens infiniment bien, sans pour autant être complètement rassurée, mais j’aime cette ambiance nocturne, l’excitation de l’aventure et puis je sens, quoi qu’il en soit, la bienveillance de la nature et la guidance de quelque chose qui me dépasse. Je sais que je peux faire confiance et que ce moment est un cadeau. Je descends. Ca n’en finit pas de descendre. Il fait nuit noire mais mon regard s’est habitué et je vois où je vais. Il ne sert plus à rien d’aller vite. Je peux prendre mon temps. J’ai tout mon temps d’ailleurs. Toute la nuit, et même demain s’il le faut, et les jours suivants. Je peux prendre tout mon temps et savourer cette balade. Je descends. Je parle aux arbres, je rigole avec eux de la situation, je parle à mon vélo qui me suit si docilement, sans se plaindre alors que ses pédales cognent contre des cailloux, que des branches se coincent dans les rayons. On est tous ensemble et je me sens vraiment bien. On descend lentement en faisant des petits virages entre les arbres. Et puis j’aperçois le toit d’une maison et une petite route, j’enfourche le vélo. Il fait nuit et je n’ai pas de lumière, il faut donc que je rejoigne la piste cyclable qui longe le lac et qui doit être à peu près à 8 km d’ici. Je roule prudemment car l’obscurité est totale, les voitures vont vite et ne me voient pas. Je rejoins la piste cyclable sans problème et j’arrive au bord du lac. Là, un panneau annonce que la voie est fermée car elle est inondée. Le lac a débordé. Il faut passer par la route, ce que je refuse de faire. Sans lumière, c’est suicidaire. Je prends la voie inondée et pédale sur 13 km dans 10 à 30 cm d’eau. Je rigole intérieurement et je remercie car je dois bien avouer que j’adore ce que je suis en train de vivre. Je me sens tellement bien. Je parle au lac, aux montagnes, à mon vélo, au ciel, je chantonne, je plaisante. Je suis trempée, j’ai mal aux fesses, mal au bras, aux pieds, et je ne sens rien de ces douleurs. Je pourrais continuer pour toujours. J’ai même envie d’être encore dans la montagne, que la descente ne s’arrête jamais. Me poser dans un creux et dormir, entourée de ces présences qui me font tant de bien. Toujours dans l’eau, je m’étonne de ce que j’ai été capable de faire et je m’en réjouis. Je sais que j’aime ça au plus haut point.

Je finis par rentrer chez moi après avoir traversé la ville à coté de mon vélo, le plus naturellement du monde mais complètement trempée. Il est plus de minuit et les gens boivent des coups en terrasses.
Voilà pour cette mémorable sortie à vélo. Cadeau de la grenouille. Je sais que c’est elle qui prend le contrôle, pourrait-on dire, et qui m’attire hors des sentiers battus, pour me montrer ce que j’ai en moi, pour nourrir mon amour du terrain montagneux et forger mon endurance. Me montrer que je peux avoir confiance, que je suis accueillie, qu’un terrain non balisé n’est pas hostile, si je suis mon instinct sans avoir peur. Je sais que quand je le souhaite, je peux retrouver ces sensations. C’est là, à portée de mains.

Avant de terminer ce petit témoignage, il reste encore une chose que la grenouille m’a apportée. Toujours en lien avec la pratique de la montagne. Je crois que Grand-mère a contribué à cette dernière chose (une cérémonie faite quelques jours après le troisième Kambo). Quand je marche en montagne, des grandes montées de plusieurs heures, ou quand je grimpe à vélo, la grenouille m’a appris à placer ma conscience dans différents endroits du corps, à modifier sensiblement la position de mon pied sur le sol ou sur la pédale, la flexion du genou, si bien que je perçois la circulation du Qi, je sens l’énergie qui vient de la terre, monte, traverse le bassin et redescend pour rejoindre la terre par le gros orteil, tout en passant par un carrefour au niveau du ventre, où elle croise un autre courant d’énergie véhiculée par ma respiration, si bien que je ne fais plus d’effort physique, dans le sens où je ne fatigue pas et où je tiens une excellente cadence, sans fin. Ce qui me permet d’aller librement crapahuter dans la nature, pendant 8, 10, 16h, et plus encore, sans crainte, sans fatigue, avec joie, conscience, amour et gratitude.

Jusqu’à l’année dernière, je traversais régulièrement des périodes d’apathie, liée à une consommation excessive d’alcool et de tabac, pour combler des manques et calmer des angoisses. Dans les moments les plus noirs où je touchais le fond, au point de demander de l’aide au ciel, à chaque fois, le jour suivant, une main divine prenait le contrôle de ma personne et me mettait sur mon vélo, sans que je puisse ni même savoir si j’en avais envie ou pas. Et je partais pédaler. Grimper. Grimper, et revivre. Me reconnecter. Sentir la nature, son accueil, sa bienveillance, sa guidance. Et je filais les larmes aux yeux, me sentant bénie des Dieux, incapable de penser quoi que ce soit tant l’amour que je recevais était au-delà de ce que je pouvais concevoir. Cette main est venue me sauver, une fois, deux fois, trois fois, dix fois. Je suis tombée dans le noir bien des fois et elle est toujours venue. Je sais que cette main est une amie de kambo. Ces deux sensations divines légèrement différentes sont liées, je le sens. La main qui me met sur mon vélo, et kambo qui m’a appris à Être sur mon vélo. Là-haut, là-bas, ça coopère. Il faut juste demander, et accepter de recevoir.
Dans la problématique qui est la mienne et qui m’a amenée à la médecine, il y avait cette incapacité à incarner mon corps, à prendre conscience de la profondeur de mes ressentis. J’avais depuis toujours un amour pour la nature mais qui restait en surface, un amour contemplatif. Je ne me sentais pas capable de gravir des montagnes, de pédaler pendant des heures. Je n’y pensais même pas. De plus j’étais persuadée d’être en mauvaise santé à cause de la cigarette. J’avais à peine  commencé à profiter de la montagne, deux, trois ans avant ces kambos, à faire mes premiers tours à vélo, mes premières vraies randos, et la grenouille a parfaitement su par quel bout me prendre pour me révéler à moi-même et me sauver littéralement du gouffre au bord duquel je me tenais. J’ai reçu un enseignement d’une puissance incroyable, la capacité à être dans la montagne, éprouver la noblesse de la simplicité, de l’effort, de la matière, sentir la vie dans son corps, dans chaque respiration, dépasser les limites des fausses croyances liées aux doutes, et faire confiance à son instinct, qui atteint son plein potentiel quand on est immergé dans la joie la plus pure et la plus simple, celle d’être juste heureux d’être là, dans la nature.

Cet ancrage a été opéré avec tant de finesse, de justesse que j’en suis subjuguée encore aujourd’hui. On est capable de tant de choses. J’ai vraiment l’impression d’avoir été coachée, d’avoir suivi un entrainement intensif pendant ces quelques semaines de Kombos.  Il était indispensable que je découvre ces choses pour me préparer à ce qui allait venir ensuite, car ce n’était qu’un début… Mais ça c’est une autre histoire.




* La grenouille, ou Kambo, est une pratique chamanique qui consiste en une purge très poussée, par application sur le mésoderme d'une sécrétion de grenouille arboricole appelée Phyllomedusa Bicolore. L'expérience n'est pas vraiment confortable. La purge dure environ trente minutes et n'a pas d'effet psychotrope, à proprement parler.

**col de l'Epine !! J'avais déjà fait trois, quatre grandes montées de ce genre avant Kambo, et plusieurs grosses randos avec des heures et des heures de montée, où j'avais craché mes poumons et forgé une bonne base d'endurance. De même, je fais du Qi gong quasi-quotidiennement depuis 2 ans. Je précise cela pour dire que la Grenouille ne fait pas de miracle mais s'installe là où il y a un potentiel.C'est une puissante médecine du corps physique, mais aussi des corps énergétique, émotionnel, éthérique, médecine de l'esprit, médecine holistique.

Autres articles "témoignages chamaniques": "Coup de Tabac", "retour de bâton"... sous le libellé "chamanisme".

dimanche 7 mai 2017

Extrait: l'Ecosophie, par Lil Kaitesi

"Petit manifeste pour une écologie spirituelle.

Écosophie signifie « sagesse de l’environnement » ou « sagesse de la nature ». 

Cette approche part de l’idée que la nature est suffisamment intelligente pour se régénérer elle-même et que, par ailleurs, l’homme aurait beaucoup à en apprendre sur sa vie sociale. 

L’écologie, au contraire, affirme que la nature est faible et qu’elle dépérit si on ne la protège pas. Forts des calculs et analyses effectués par les laboratoires, les scientifiques s’affairent à aménager des territoires « préservés » mais, en réalité, ils ne font que compliquer la situation, aseptiser des espaces et éradiquer des espèces qui chacune ont un rôle dans le monde naturel. Quoique reconnaissant la dépendance de l’homme vis-à-vis de la biosphère, l’écologiste garde au fond de lui l’idée cartésienne que la nature lui est éternellement étrangère, tandis que l’écosophe souffre de cet état des choses, sachant que son aliénation à la nature extérieure est un indicateur du fait qu’il ne connaît plus sa nature intérieure. Si le militant « vert » s’agite pour sauver quelques arpents de forêt, l’écosophe, lui, sait que tant que l’homme sera déconnecté de la nature, il continuera à la détruire. 
L’écologie procède d’une volonté de démonstration de la toute-puissance de l’homme, de sa capacité à faire face à toute situation grâce à son intelligence, à ses technologies et à ses institutions mondiales. En se dirigeant vers un totalitarisme vert. 

À l’opposé, l’écosophe a confiance dans les puissances de la nature qui ont permis à l’humanité de vivre ses expériences sur Terre. En cessant de se prendre pour Dieu, en s’ouvrant à nouveau aux mystères de l’univers, l’écosophe redécouvre un formidable espace de liberté où il peut reprendre le chemin vers la source de toutes choses.

Réalisons-nous à quel point la destruction de la nature est en train de nous transformer, en tant qu’individus et en tant que société ? Pouvons-nous encore imaginer la conscience qu’avaient les hommes, voilà seulement quelques siècles ? Les hommes ont oublié comment dialoguer avec l’Autre Monde, celui des arbres, des animaux et... des hommes. Alors, quand la question écologique leur vient finalement à l’esprit, ils ne savent comment résoudre un problème qui masque une crise métaphysique profonde à laquelle on ose à peine penser. Nous ne savons plus dans quel monde nous sommes, ni dans quel monde nous voulons vivre. L’écosophie est née du constat que la surenchère de technologie et de consommation a non seulement désertifié nos campagnes, mais a aussi et surtout desséché nos vies. Chaque arbre coupé nous déracine un peu plus de notre être profond. Il ne tient qu’à nous d’ouvrir notre cœur, afin qu’il soit à nouveau irrigué par la sagesse éternelle de la nature. Seul un changement en nous-mêmes pourra changer les choses hors de nous."

Le texte de cette jeune femme trentenaire, Lil Kaitesi, m'a énormément touchée. Il sonne très juste....
On peut retrouver ce texte dans un ouvrage de type hermétique ( dans les deux sens du terme! Aussi bien dans le sens "inscrit dans la ligne de pensée d'Hermès trismégiste", que dans le sens où il faut avoir quelques bases gnostiques* pour profiter plus pleinement de ce texte, sinon il ne pénètre pas la conscience!) :

Lil Kaitesi, "Merkavah".

Base gnostique : l'idée c'est d'avoir pris conscience d'une manière ou d'une autre, qu'il existe sur terre une connaissance très particulière, de type universelle, qui s'est "incarnée" sous des visages culturels différents en fonction des régions du globe, ce depuis l'aube de l'humanité, et que sous ces visages différents, (Tao, Ayurvéda, Christ, Bouddhisme, Unani Tibb, Chamanisme...)  le message est le même.

L'écosophie ici présentée est une formulation moderne d'une sagesse immémoriale, pilier de ce qu'on appelle aussi parfois la Tradition Primordiale.

mercredi 22 mars 2017

Hyper-sensibilité




Voici un article de l’INREES intitulé "Nos enfants sont-ils en train de muter" et qui parle d'hyper-sensibilité. Je vous propose de lire l'article dans un premier temps, ci-dessous, puis le petit échange que j'ai eu ensuite avec Thomas, un ami chercheur au Cnrs.





"Nos enfants sont-ils
en train de muter ?

Enfants précoces, autisme, hyperactivité, extra-sensorialité…
Les nouvelles générations semblent voir éclore de plus en plus
de personnalités atypiques. Est-ce vraiment le cas ?
De quoi sont-elles symptomatiques ?

Dans le service de pédopsychiatrie du Dr Lombard, arriva un jour un jeune garçon bon à l’école, mais qui se fichait de tout. Formé à la psychanalyse jungienne, le médecin le soumit à une vingtaine de questions existentielles. « Pourquoi vient-on sur Terre, quel est le sens de la vie ? » débuta-t-il. L’enfant sembla déstabilisé, mais il l’encouragea : « Ferme les yeux, va au fond de toi, prends ton temps, tu connais la réponse. » Au bout de quelques minutes, les yeux pleins de larmes, le garçon répondit : « Pour aimer. » Le Dr Lombard enchaîna : « Quand es-tu le plus heureux ? » Quand il jouait au basket. « Preuve d’un besoin de communion », analysa le médecin, qui poursuivit : « Si une très bonne amie de ta maman t’invitait deux mois en Italie, tu irais ? » Oui, « tout de suite », s’exclama l’enfant.

Ce dernier ne se fichait absolument pas de tout ! Ses centres d’intérêt étaient simplement plus élevés que ce dont le nourrissait son environnement quotidien. Pour le psychiatre, il était resté « connecté au Soi », c’est-à-dire à la globalité psychique de son être. « Chez ce type de personnalités, le goût de la découverte est plus fort que le besoin de sécurité, précise le médecin. Ils sont en recherche d’harmonie, d’information, de conscientisation. » Le Dr Lombard lui proposa de visiter son unité. « Elle accueille des jeunes de ton âge, entre 6 et 12 ans, lui expliqua-t-il. Certains se posent beaucoup de questions, ils sont là pour réfléchir et se reposer. » Le garçon accepta avec enthousiasme. « Il ne devait pas entrer à l’hôpital comme malade, mais comme soignant ! conclut en souriant le Dr Lombard. Il faut se méfier des étiquettes. Il suffit parfois de recréer du lien. Quand j’explique à ces enfants que nous appartenons à une conscience supérieure, ils cessent de se sentir des intrus. »




Une forme de porosité


Des jeunes connectés à leur Soi, le pédopsychiatre estime en rencontrer de plus en plus. Hypersensibles, dotés d’une vision globale des situations, ils ont souvent du mal à comprendre le monde dans lequel ils sont tombés, et peuvent très vite se sentir en décalage. « Depuis dix ans, j’en vois partout ! souligne le médecin. Parmi les six cents enfants dont je m’occupais à la fin de ma carrière en service hospitalier, au moins soixante étaient concernés – alors qu’ils étaient très rares il y a quarante ans. »



Comment expliquer qu’ils soient de plus en plus visibles ?

Avides d’harmonie, ils peuvent, face à une réalité sociale violente, intolérante et individualiste, devenir agressifs, se refermer ou déprimer. Etonnamment matures, ils sont aussi d’une grande insécurité. Leurs compétences cognitives déroutent, de même que leur sens aigu de la vérité, de la justice et de la cohérence. Intuitifs et réceptifs, ils répondent à des questions non formulées et résolvent facilement des problèmes, sans mettre de mots sur leur raisonnement. La tête dans la lune mais boulimiques de nouveaux apprentissages, ils s’ennuient souvent à l’école, confrontant autant leurs professeurs que leurs parents. Qui sont ces enfants ? Comment expliquer qu’ils soient de plus en plus visibles ? Pour la psychologue Jeanne Siaud-Facchin, spécialiste des surdoués, tout vient de la reconnaissance, depuis une quinzaine d’années, d’une forme d’intelligence atypique, plus axée sur les compétences du « cerveau droit » que sur celles du « cerveau gauche ». « Les apports des neurosciences montrent que la structure et le fonctionnement de leur cerveau sont différents », indique-t-elle. La densité de leurs connexions neuronales s’avère plus importante, tant au niveau du cortex préfrontal – la zone la plus aboutie de l’intelligence –, que du lobe pariétal, – la plaque de redistribution de l’information dans le cerveau. « D’où, sur le plan intellectuel, une immense rapidité d’analyse, de compréhension, de traitement et de mémorisation », note la psychologue.

Autre spécificité essentielle : l’hyper-connectivité de leurs hémisphères cérébraux, liée à une structure particulière du corps calleux qui les sépare, mais aussi l’engagement préférentiel du droit, y compris pour des tâches qui font habituellement d’abord appel au gauche. « D’où une approche plus globale, plus imagée, plus affective et plus analogique des choses, qui absorbe les informations par impression et se déploie en arborescence de manière fulgurante et intuitive », poursuit Jeanne Siaud-Facchin. Ce qui les dote d’un rapport au monde intense. « Les sens plus aiguisés que la plupart des gens, ils voient tout, entendent tout, ressentent tout », détaille la psychologue, et captent des signaux que personne d’autre ne perçoit, ce qui amène parfois à développer des capacités de visionnaires, ainsi qu’une compréhension subtile, souterraine, du monde et des gens.



Une plus forte capacité à ressentir les émotions d’autrui...

Le revers de la médaille ? Une énorme perméabilité affective. « Il a été montré qu’ils avaient une vulnérabilité particulière de l’amygdale, cette zone nichée au fin fond du cerveau archaïque dont la fonction est de décoder les émotions », souligne Jeanne Siaud-Facchin. Résultat : ce qui serait une broutille pour quelqu’un d’autre déclenche chez eux un cataclysme affectif. « Ils ont aussi des neurones miroirs en plus grande quantité, observe la psychologue, d’où une plus forte capacité à ressentir les émotions d’autrui. »





L’aube d’une nouvelle humanité ?


Empathiques, hyper-connectés à leur environnement, ils peuvent se sentir tout le temps envahis… Et déranger une société qui juge référent un fonctionnement plus linéaire, conceptuel et analytique. Que faire de ces drôles d’oiseaux qui « savent » sans pouvoir expliquer comment, qui mêlent une immense sensibilité à une lucidité acérée, qui déploient une énergie brouillonne qui peut passer pour de l’arrogance, qui captent inconsciemment des signaux que les autres ne perçoivent pas, et semblent avoir accès à des informations cachées ?

Pour la psychologue Marie-Françoise Neveu, qui accompagne depuis plus de trente ans des enfants qu’elles nomment « actuels », pour éviter de leur coller d’autres étiquettes, il s’agit d’abord de les accueillir tels qu’ils sont. « Des découvertes ont mis en évidence une réseau neuronal autour du cœur », souligne-t-elle. Pour elle, ces jeunes sont symptomatiques de l’émergence d’une intelligence émotionnelle, qui s’émancipe « de la dualité entre cerveau droit et cerveau gauche pour entrer dans une forme d’unité ». De son point de vue, ils sont aussi le signe d’une évolution de l’humanité vers une conscience plus globale, plus ouverte au sacré, plus en besoin de respect, de justice et de sens. « Il faut changer de regard sur ces enfants, poursuit-elle. Ils ne sont pas dysfonctionnant, ils ont juste des compétences particulières. » De même qu’il ne faut pas les mettre sur un piédestal ou les croire investis d’un « pouvoir », juste parce qu’ils font preuve d’une créativité fulgurante, ou de perceptions et d’intuitions hors du commun. « Oui, ils ont accès à d’autres dimensions. Oui, ils ont une approche du temps moins linéaire, plus centrée sur l’instant – ce qui peut entraîner des difficultés d’action. Oui, ils sont en phase avec une évolution vibratoire de l’Univers, estime-t-elle. Mais notre mission, en tant qu’adultes, n’est pas de les idéaliser ; simplement d’accepter leur particularité » et de faire la démarche de comprendre comment ils fonctionnent, afin de les accompagner au mieux, au regard de leurs besoins.



Ces jeunes sont symptomatiques de l’émergence d’une intelligence émotionnelle...

Jeanne Siaud-Facchin confirme : « Si l’enfant rencontre des difficultés, il faut les analyser à la lueur de son profil. Si l’on part du principe qu’il est paresseux, pas motivé, opposant et qu’il en n’en fait qu’à sa tête – ce que ces êtres atypiques entendent souvent, de la part de leurs enseignants ou de leur entourage –, on le maltraite. » Au lieu de l’aider, on l’enfonce, on l’empêche de s’épanouir. Il risque de se braquer, de rejeter l’ensemble de règles. Mais si on reconnaît sa différence, on peut la prendre en compte pour ajuster la réponse… sans forcément, bien sûr, tout expliquer par ce prisme. « S’il sent qu’il a une place, qu’il est reconnu, l’enfant pourra, lui aussi, faire l’effort de s’adapter au système », estime la psychologue.

« L’essentiel est de veiller à ne pas leur forger de fausse personnalité, commente le Dr Lombard.Il ne faut rien induire, simplement écouter et recevoir, pour qu’ils se sentent compris. Tout l’art est de les mettre en situation d’auto-thérapie. Lorsqu’ils sont dans le Soi, les enfants savent mieux que quiconque ce dont ils ont besoin. » Bien sûr, chaque cas est complexe, particulier. Plus on agira en anticipation plutôt qu’en réaction, plus on pourra compter sur des institutions scolaires qui ne cherchent pas à faire entrer tout le monde dans le même moule, plus il existera des réseaux de soutien et de diffusion de l’information à destination des parents, plus il sera possible de saisir tout ce que ces enfants peuvent apporter. « A mon sens, il faut regarder ces personnalités atypiques dans une perspective évolutive, conclut Jeanne Siaud-Facchin. Leur donner plus de place pourrait considérablement faire avancer l’humanité. »

Fin de l'article.


Discussion :)

Thomas : Le "très bon article" me semble un peu exagéré... Le premier paragraphe est une jolie histoire, ok, et il y a pas mal de choses intéressantes, mais invérifiables. Mais déjà j'aimerais bien savoir sur quoi l'auteur se base pour dire que "les nouvelles générations semblent voir éclore de plus en plus de personnalités atypiques". Les enfants précoces ont toujours existé, les hyperactifs aussi, et il y a encore un gros doute sur l'augmentation des cas recensés d'autisme (uniquement dûs à de meilleurs diagnostiques et reclassification d'autres troubles dans cette case ?). Ensuite il y a le terme "muter" dans le titre qui sort de nulle part, et des phrases sans aucun sens, du genre "ils sont en phase avec une évolution vibratoire de l’Univers", qui enlèvent beaucoup de crédibilité à l'ensemble, qui aurait pu être intéressant si un peu plus rigoureux.

Au passage, l'extra-sensorialité n'apparaît nulle part à part dans le chapeau.

Shantée : Je comprends ton scepticisme et il est vrai que je ne suis pas très objective sur le sujet, mais plutôt enthousiaste... Bien sûr, beaucoup de choses sont "invérifiables" d'un point de vue scientifique, car la science se fonde sur un principe de causalité qui est linéaire d'une certaine façon, donc pour des gens qui ont une perception non-linéaire des choses, une intuition hors du commun, une perméabilité à d'autres dimensions, ou même une perception multidimensionelle simultanée... comment prouver l'existence de ces réalités si ce n'est, approximativement, par des imageries cérébrales qui ne pourront pas vraiment montrer grand chose...? Je trouve déjà très bien qu'on reconnaisse l'existence de ces formes d'hyper-sensibilités, après, quant-à les prouver scientifiquement, ça me paraît impossible...

Thomas : Quand je disais invérifiable je voulais dire que ça manque de références pour approfondir les différentes affirmations, citations etc. Ensuite je vois l'approche scientifique comme essentiellement arborescente plutôt que linéaire... Ensuite je trouve fascinant de se poser la question de ce qu'est l'intuition, sans laquelle la science ne serait d'ailleurs pas grand chose, mais je trouve que l'intuition n'est pas grand chose quand on ne fait pas l'effort de confronter ces intuitions à la réalité, à ce qui est connu, essayer de les mettre en forme, voir si ça tient la route, etc. C'est ça l'essence de l'évolution de la connaissance à mon sens. Balancer des intuitions à tout va ne mène nulle part... Il n'y a qu'à voir les Bogdanov pour prendre un exemple connu dans le domaine des sciences dites "dures".

Je voulais aussi dire qu'il est tout à fait possible qu'on ait de plus en plus de gamins très intelligents, mais je trouve aussi cela très intéressant d'explorer de possible raisons pragmatiques : enfants qui mangent à leur faim, sont peu malades, sont stimulés intellectuellement, qui ont un accès presque illimité à l'information... Quant à la sensibilité, est-ce que ça serait pas juste qu'on vit dans une société qui permet plus qu'avant à cette sensibilité de s'exprimer ?



SB: C’est un gros débat que voilà… Pour ma part, je ne peux qu’admettre que je ne suis pas tout à fait d’accord…

Tu parles d’ « approche scientifique essentiellement arborescente plutôt que linéaire » : oui, c’est précisément cela. Mais être arborescente ne l’empêche pas d’être linéaire au sens où je l’entends : on lie des faits par des liens de causalité, cela reste réticulaire et le tout s’inscrit nécessairement dans l’espace et le temps, sorte de prisme tridimensionnel. La science ne peut pas sortir de ce cadre, c’est la base essentielle de toute démonstration que d’incarner le principe de causalité, en plus d’être reproductibles. Mais il y a des phénomènes qui ne sont pas explicables rigoureusement, ou rationnellement, parce qu’ils ne sont pas reproductibles, pas visibles à travers les perceptions usuelles, pas préhensibles rationnellement, alors est-il légitime de nier leur existence pour autant ? Leur appartenance à la réalité ?

Ensuite, tu évoques le fait de « faire l’effort de confronter ses intuitions à la réalité, à ce qui est connu, pour voir si ça tient la route » : c’est un peu compliqué de faire tenir des intuitions ( des perceptions) qui contredisent fondamentalement ce qui est officiellement connu . Je pense que le problème vient du fait qu’il existe plusieurs types d’intuition. Il y a celles qui émanent directement du Soi, dont il est fait mention dans l’article, ce Soi auquel certaines personnes, certains enfants sont connectés ou se reconnectent progressivement ; et puis il y a des intuitions qui sont formatées par des conventions inconscientes, et même si ces intuitions émanent elles aussi du Soi, tant que la personne n’est pas consciemment connectée à ce Soi, ces intuitions ne peuvent être perçues dans leur entièreté et sont sources alors de mauvaises interprétations. Et effectivement, il vaut mieux se méfier de ces intuitions et les travailler, les confronter, etc. Une intuition, au sens où il est fait mention dans l’article, n’est pas une « idée » mais un ressenti perçu avec un degré de réalité très fort, et on peut très rarement mettre des mots dessus, encore moins l’expliquer. C’est complètement irrationnel. Il y a une vraie imperméabilité entre une intuition et une explication rationnelle de cette intuition… C’est donc très compliqué… !

Dans l’article, il est fait mention non pas d’intelligence, mais d’intelligence émotionnelle et c’est ce second terme qui est important. Il s’agit d’hyper-sensibilité qui est une forme d’extra-sensorialité, et qui se manifeste de plein de façons souvent jugées « anormales » : hyper-émotivité, mutisme, inattention, rêverie, immaturité, idéalisme, etc, et très souvent, les personnes de ce genre souffrent énormément. Elles sont en décalage irréductible avec le monde qui les entoure et souffrent, se sentent différents, incompris et culpabilisent énormément. Ils tombent très fréquemment dans les dépendances de tout genre, affective, drogues, alcool, et sont souvent sujets à la dépression. Il est extrêmement difficile de supporter de voir des choses que personne autour de soi ne voit, et d’être pris pour un débile, un gars bizarre. Parce que ce qu’on voit, ce qu’on perçoit, ce qu’on sait intuitivement, semble ne pas exister pour les autres autour de nous. On se fait beaucoup de mal et on s’auto-dénigre énormément.

Tu dis ensuite que si nous voyons plus de sensibilité chez les enfants, ce serait parce que l’on vit dans une société qui permet davantage d’exprimer cette sensibilité… Mes amis clowns à l’hôpital qui interviennent auprès des services pédopsy (où l’on admet des enfants en court séjours, en non en long séjour comme en oncologie), et bien ces clowns constatent tristement une augmentation exponentielle, je dis bien exponentielle !- du nombre de tentatives de suicide chez les 13 – 17 ans…. Ce n’est pas là le signe qu’on vit dans une société qui laisse plus de place à l’hyper-sensibilité. On juge encore très négativement toute sensiblerie…et encore plus durement ce qui relève de capacités extra-sensorielles chez les enfants. C’est lié : l’hyper-sensibilité est une manifestation d’extra-sensorialité.( qui veut dire au-delà des cinq sens physiques).

Ensuite, tu parles de trouver des raisons pragmatiques à l’intelligence plus grande des gamins : je ne crois pas qu’ils soient plus intelligents au sens rationnel ou intellectuel, mais qu’ils ont une intelligence adaptée aux nouveaux vecteurs de connaissances. Une adaptation de la plasticité cérébrale aux outils de développement cognitif. Quant aux raisons pragmatiques que tu mentionnes, elles me semblent humblement illusoires :

« Enfants qui mangent à leur faim » : ils mangent trop et des produits empoisonnés aux apports nutritionnels les plus faibles qu’on ait jamais vus ;

« sont peu malades » : je ne suis pas sûre de la bonne santé de notre génération et de la suivante, en espérant que cela change dans les 20 prochaines années…

« stimulés intellectuellement » : là encore, je doute. Je ne crois pas que les tablettes tactiles avec leurs jeux stimulent véritablement la meilleure partie de la personne. Pour ne mentionner que cela.

« qui ont un accès presque illimité à l’information » : pour ma part, pareil, c’est pas forcément une aide, même si c’est une chance immense que nous avons de pouvoir tout trouver, si on sait chercher… Elle favorise le zapping, et non l’étude approfondie, l’endurance de la concentration…

Enfin, je voudrais donner un exemple plus concret si tant est que cet exemple puisse sembler concret : sur l’élévation vibratoire de la planète, dont il est aussi fait mention dans l’article.

Pour moi, elle est réelle, je la perçois et je ne suis pas la seule. Elle explique pourquoi le nombre d’enfants hyper-sensibles augmente depuis une trentaine d’années, elle explique aussi le nombre croissant de reconnexion au Soi qui s’opère actuellement, même parmi les gens qui ne sont pas hyper-sensibles à la base. Mais rien de ce qui est connu ne permet de la voir, et encore moins de l’expliquer, en tout cas pour l’instant. Comment échanger sur le sujet, le plus honnêtement possible, entre les tenants de la rationalité et les hyper-sensibles dits « connectés » ?



Thomas : Malheureusement je n'ai pas tout le temps que je voudrais pour répondre comme il faudrait... Mais :

D'une part je suis tout à fait d'accord, et il faudrait être de très mauvaise foi pour le nier, qu'il y a des phénomènes qui échappent à la science, et il y en aura peut-être (certainement ?) toujours. Mais premièrement je ne sais pas si c'est juste parce que la science ne les a pas encore compris, ou parce qu'ils se trouvent intrinsèquement en dehors de ce que l'esprit humain peut comprendre et expliquer rationnellement. D'autre part, ça n'est pas parce qu'on admet l'existence de choses non expliquées, qu'on doit avaler tout ce que disent ceux qui prétendent être témoins de tels phénomènes (apparitions, esprits tapeurs, extraterrestres, lévitation, télépathie, télékinésie, etc). Je ne dis pas que rien n'existe, mais si tout existait à la fois il y aurait beaucoup plus de monde à en être témoin !

Ensuite je serais curieux de savoir à quoi tu penses quand tu parles d'intuitions "qui contredisent fondamentalement ce qui est officiellement connu" ? Quel genre de connaissances contredisent-elles ? Ensuite je ne crois pas qu'il y ait différents types d'intuition, mais je suis d'accord qu'elles peuvent être guidées ou influencées, voire bridées, par notre schéma mental. Par exemple il est clair qu'on n'aura pas facilement d'intuitions sur les nombres premiers si on ne les a pas étudiés, qu'on n'a pas assimilé un certain nombre de vérités sur leur nature et habitué notre cerveau à ce concept. Du coup la culture influence nos intuitions. Et probablement qu'elle les bride souvent. Je ne parlerai pas du Soi car je ne sais pas exactement ce que tu entends par là, même si je pense en avoir une idée. Mais pour moi toutes les intuitions viennent juste de nous, on peut en avoir plus ou moins et des différentes en fonction de tout un tas de facteurs, notre sensibilité, notre capacité à faire des connexions, notre ensemble de croyances et de valeurs...

Et je vois très bien ce qu'est l'intelligence émotionnelle, cependant je ne suis pas d'accord pour affirmer qu'il s'agit d'une forme d'extra-sensorialité, ou du moins il faudrait que tu m'expliques dans quel sens tu l'entends, et pourquoi ce terme s'appliquerait plus à cette forme particulière d'intelligence. Parce qu'elle rend plus empathique et permet de mieux se relier aux autres ? A ce moment là chaque type d'intelligence nous donne des capacités supplémentaires et différentes en ce qui concerne notre perception et compréhension du monde, est-ce qu'on ne devrait pas juste dire que l'intelligence en général est un sixième sens ? Pourquoi se focaliser sur l'intelligence émotionnelle ? D'autant qu'on peut très bien combiner différents types d'intelligence, logique, émotionnelle, musicale, corporelle... Et il me semble qu'on est toujours, par définition, "hors norme" dès qu'une de ces intelligences est développée plus que la moyenne. Par contre je suis d'accord qu'une intelligence émotionnelle sur-développée peut probablement faire plus mal que les autres types d'intelligence dans un monde qui porte tant de malheur et d'injustice.

Quant à l'explication du fait qu'on voit plus de sensibilité chez les enfants, c'était une hypothèse comme ça... Ça peut être aussi juste le fait qu'on n'a jamais été autant à vivre de manière aussi privilégiée et à passer autant de temps à se regarder le nombril et à théoriser sur nos états d'âme (disons que c'est ma grand-mère qui parle) ;-) Quant à l'augmentation des tentatives de suicide, il est aussi possible que la perte de sens et d'espoir dans l'avenir dans notre civilsation l'explique aussi bien qu'une augmentation de la sensibilité.

Ensuite, par rapport aux raisons pragmatiques comme la santé et l'alimentation, je suis d'accord que ça dépend par rapport à quand on compare. Mais globalement, par rapport à il y a un siècle, il me semble clair que les enfants sont mieux soignés, mieux nourris, et qu'ils ont accès à toute l'information qu'ils veulent. Après bien sûr tous ne font pas bon usage de cette information, mais certains le font (j'espère plus qu'on ne le croit).

Sur l'"élévation vibratoire de la planète", je ne vois pas où il en est fait mention dans l'article. Il parle d'une "progression vibratoire de l'univers", qui me paraît tout aussi vague mais n'a pas l'air d'être la même chose à première vue. Je n'aurai pas l'outrecuidance de prétendre que les termes "élévation vibratoire de la planète" ne recouvrent aucune réalité, ni n'en ai-je l'envie (je pense en effet que beaucoup de concepts mystiques et religieux sont utilisés depuis que l'homme est l'homme pour décrire des phénomènes qu'on observe, sent ou intuite, avant d'en trouver une meilleure explication), mais j'aurais besoin d'aide pour comprendre ce que tu entends par là. Est-ce que tu parles du rythme de vie de plus en plus effréné, du fait que tous les voyants démographiques, écologiques, économiques, etc, sont dans le rouge, d'un mécontentement et d'un sentiment de perte de sens et d'espoir croissants ?



SB: Merci beaucoup Thomas pour ce passionnant échange.



Sur les phénomènes que la science ne peut expliquer, je pense et j’opte pour ta deuxième hypothèse : il existe des phénomènes qui se trouvent intrinsèquement en dehors de ce que l’esprit humain peut expliquer rationnellement. Cela n’implique pas pour autant que ces phénomènes ne puissent être « compris », mais pas scientifiquement. Tel que je vois les choses, on peut imaginer que l’esprit humain soit une immense sphère aux contours diffus, presque infinie, même sans doute infinie, et au sein de cette sphère s’en trouve une autre, plus petite, mais très grande aussi, mieux délimitée, qui est l’esprit rationnel. Cet esprit rationnel, on peut aussi le voir comme la canne blanche d’un aveugle qui permet de s’assurer d’où on met les pieds, pour avancer avec une certaine sécurité, toutefois relative. Cet esprit rationnel dont la méthode scientifique délimite les contours est hyper important. C’est vraiment notre canne blanche qui nous donne des repères dans la réalité qui nous entoure. Mais ce n’est, à mes yeux, pas plus qu’une canne blanche (je ne dis pas béquille parce que ce n’est pas une béquille, c’est bien plus important que ça). Cela veut dire qu’à l’aide de cette canne, on ne peut se confronter qu’à ce qui est de même nature, sur le chemin : ici un mur, là un trou, un ravin, un obstacle etc, etc. Et on met un pas devant l’autre avec énormément de précaution. Mais la réalité est bien plus riche et complexe que ce que notre canne nous permet d’en percevoir et je crois que ce n’est pas avec cette canne blanche qu’on pourra l’appréhender, tout bonnement parce qu’il faudrait casser la canne, ce qui n’est pas forcément pertinent car on a vraiment besoin de cette canne.



Ensuite, il y a comme tu dis une grande différence entre le fait d’admettre l’existence de phénomènes inexpliqués et le fait d’avaler toutes les histoires étranges qu’on entend. C’est à chacun de faire preuve de discernement et de sentir ce qui résonne au-delà de ce qui raisonne. Pour ma part, j’ai toujours été très sceptique à l’égard des histoires dites surnaturelles, et allergique à toute forme de mysticisme. Je viens d’un milieu athée et j’ai suivi une formation scientifique, ce qui a forcément beaucoup façonné mon mental. Je me disais que ces phénomènes étranges étaient un peu comme la partie visible d’un iceberg lointain, qui montrait bien qu’il existait plus de choses que nous ne pouvions le concevoir. Mais je m’en fichais un peu de cet iceberg car personnellement, je ne voyais aucune trace de quoi que ce soit d’étrange autour de moi. Ensuite, mon propre parcours m’a amenée à vivre une reconnexion au Soi qui a commencé il y deux ans, progressivement, pour aboutir l’été dernier. Pour schématiser un peu ce que cela fait, je reprends ma métaphore des sphères : on va dire qu’avant la reconnexion, j’étais moi aussi une toute petite sphère qui évoluait consciemment au sein de la sphère rationnelle et de temps en temps, lorsque je m’approchais d’un bord de la sphère, je distinguais très faiblement qu’il y avait autre chose au-delà du bord. Mais je me croyais « finie », bordée, et j’évoluais ainsi dans mon monde lui aussi plus ou moins délimité. La reconnexion au Soi chamboule tout ça. Pour imager, on peut dire que c’est comme si la toute petite sphère que j’étais a changé de consistance, qu’elle avait fondu, qu’elle s’était dissoute, évaporée, et qu’en même temps, les bords de la sphère rationnelle étaient devenus transparents et perméables pour se fondre, sans disparaître, dans la très grande sphère brumeuse de l’esprit en général. C’est aussi comme si j’étais devenue simultanément chaque point de l’ensemble, que j’étais partout et nulle part. J’ai du apprendre peu à peu à domestiquer ces différents degrés de conscience par la méditation et un contact très fréquent avec la nature pour construire un nouvel équilibre, ce qui n’a pas été sans mal. Ca reste un travail quotidien d’ailleurs.



Le plus important à comprendre dans cette histoire de reconnexion, c’est qu’il faut bien s’interroger sur ce qu’il y a derrière le pronom « Je » qu’on utilise sans réfléchir. Dans 90% des cas, le Je est une petite sphère limitée qui se caractérise par un nom et un prénom, une adresse, une profession, un parcours de vie, des goûts, des expériences. Et dans de plus rares cas, le Je peut être impersonnel. Comme un simple entonnoir qui canalise dans ce tout petit pronom une conscience qui dépasse les limites d’une « personne ». C’est pour cela que quand tu dis que les intuitions viennent de nous, c’est vrai et faux en même temps. Tu as tout à fait raison de dire que notre mental, notre sensibilité, notre culture façonne notre disposition à avoir des intuitions. Mais il est aussi vrai que certaines intuitions peuvent venir d’ « au-delà ». Je peux te donner un exemple. Je rencontre une personne que je ne connais pas. En un flash, j’ai toute la vie de cette personne qui m’apparaît. C’est extrêmement étrange car une vie c’est long, c’est plein d’évènements, et un flash, c’est plutôt très court. Et pourtant, cette personne n’a rien à me raconter que je ne sache déjà, intuitivement, sur elle, sur ce qu’elle est au plus profond d’elle-même. Sans avoir connaissance d’aucun détail trivial, je sens l’empreinte qu’a laissé tout ce qu’elle a vécu. On ne peut pas expliquer rationnellement ce genre de ressenti. Et si, au moment du ressenti, je choisissais de m’interroger sur le pourquoi et le comment, je perdrais la connexion. Or il est clair qu’il y a une violation de la loi de causalité. Il y a une espèce de sublimation de l’espace-temps qui donne à un flash une dimension infinie. Toute tentative de rationalisation détruirait l’objet. Tandis que si je m’oublie et me fond dans le ressenti, je peux le faire grandir.



Cet exemple illustre une forme d’hyper-sensibilité, d’extra-sensorialité, d’empathie profonde, ou d’intelligence émotionnelle comme on dit. Je ne suis pas très à l’aise avec le terme intelligence qui me semble inadapté, quoique très pratique. Il s’agit plus de sensibilité. Sensibilité logique, musicale, corporelle pour reprendre tes exemples. Là où le terme intelligence est intéressant, c’est qu’il induit l’idée d’une justesse dans la sensibilité. Il ya une adéquation entre le ressenti et l’objet qui inspire le ressenti. Une justesse qui ne peut être prouvée ou démontrée. Il se passe la même chose quand on écoute pleinement un morceau de musique, quand on contemple une œuvre d’art, quand on lit un roman. On exerce notre sensibilité sous toutes les formes qu’elle revêt. Une sensibilité multidimensionnelle ( émotionnelle, corporelle, auditive, olfactive, logique, etc). On sent qu’on touche une vérité fondamentale mais ineffable, transcendante et immanente.



Donc oui, tu as raison de dire que l’intelligence ( la sensibilité) en général est un sixième sens et bien plus encore. Mais je crois aussi que nous nous méprenons profondément sur ce qu’est une émotion. Sans trop entrer dans le détail, je dirais qu’à un certain de degré, une émotion c’est une intuition. Une émotion c’est un mouvement de sensibilité qui bouge des choses à l’intérieur de nous et qui nous révèle des parties de nous-mêmes encore méconnues. Une peur, une joie, une impatience, une colère… Ca nous apprend quelque chose sur nous. L’émotion est un véritable guide de connaissance, non pas sur le monde, mais sur nous. Quand une émotion nous traverse, il faut apprendre à ne pas la réduire à son expression première mais à s’en détacher pour voir ce qu’elle « enseigne ». C’est très compliqué. Parce qu’on a vite tendance à se réfugier dans la rationalité. Il faut trouver un équilibre … et c’est le travail de toute une vie. Ce n’est pas nombriliste que de faire cela. Au contraire. Et comme nous ne pouvons pas connaître le monde autrement que par ce que nous en percevons, il semble judicieux de commencer par se connaître mieux , afin d’épurer le plus possible nos filtres. Ce n’est là que mon point de vue. Le seul véritable objet qui soit à la portée de notre connaissance, c’est nous-mêmes, et cela n’est pas facile à admettre quand rien ne nous fascine plus que la nature qui nous entoure et que ce qu’on prend pour de l’humilité nous amène à détourner le regard de notre propre personne.



Un mot par rapport au taux de tentatives de suicide chez les jeunes : en fait, l’augmentation est surtout flagrante chez les plus jeunes, ceux qui ont 12-13 ans. C’est un âge auquel il est difficile de dire que c’est la perte de sens et d’espoir dans l’avenir de notre civilisation qui motive ce genre de gestes…



Et enfin, un mot pour répondre à ta question sur l’élévation vibratoire de la planète ou la progression vibratoire de l’univers. L’élévation vibratoire de la planète est une manifestation de la progression vibratoire de l’univers. Ce n’est pas, à mes yeux, un concept mystique ou religieux. Il ne traduit pas l’ensemble des phénomènes que tu mentionnes (voyants démographiques, écologiques, économiques dans le rouge, accélération des rythmes de vie). Ces phénomènes sont une conséquence de deux grandes causes : l’activité humaine qui dégrade la planète et la réaction de la planète à travers ses lois physiques. L’élévation vibratoire se passe à un autre niveau qu’il est compliqué de décrire. Je vais prendre une image encore très simple. Visualise la terre dans son petit coin d’espace. Notre belle grosse planète bleue. Imagine qu’elle vibre en émettant un son assez grave. Nous, petits êtres humains qui sommes à sa surface, sommes accoutumés à sa vibration et nous évoluons le plus tranquillement du monde. Maintenant, imagine que la planète commence progressivement à vibrer un peu plus vite, et que le son qu’elle émet monte en tonalité. Nous, petits êtres humains, commençons à vibrer plus forts également car la vibration passe à travers nous. Cette vibration commence à effriter un peu le sédiment qui nous constitue en tant que personnes, des petites couches de plâtre commencent à tomber. Cela nous amène à voir ce qu’il y a sous les couches de plâtre. Cela se traduit concrètement par beaucoup de prises de conscience, beaucoup d’effondrements de nos croyances, de remises en question de nos choix de vie, que ce soit à l’échelle individuelle ou à l’échelle de la société. Cela explique aussi qu’il y ait un grand nombre de reconnexion spirituelle (c’est-à-dire au Soi). Je conçois parfaitement qu’on ne croit pas à cette élevation vibratoire, qu’on ne la sente pas et ça n’est pas très important. En ce qui me concerne, depuis ma reconnexion, pour donner un exemple, pour montrer aussi comme cela peut aller loin, ce sont mes vies antérieures qui sont remontées à ma conscience, avec toutes les leçons que j’en ai tirées au fil des vies, alors que je ne croyais pas, avant cela, à l’existence de l’âme. Mais je suis bien obligée d’admettre les faits, non sans avoir résisté un temps, alors qu’ils contredisent ce qui est connu de la réalité.



mercredi 28 décembre 2016

Ani-mal

Voici un post un peu fâcheux qui va à l’encontre des bons sentiments de circonstance en cette période de fêtes. Il s’agit une fois de plus d’une petite vidéo qui témoigne de notre rapport aux animaux. Les images ne sont vraiment pas agréables, c’est clair. Mais c’est pourtant comme ça que ça se passe. Et ce n’est pas un abattoir. Je vais me permettre de donner mon avis personnel sur cette question qui me semble vraiment très importante, à savoir, la façon dont on traite le vivant dans notre société qui se veut évoluée. Que ce soit les milliards d’animaux d’élevage menés à l’abattoir chaque année, ou ceux qui sont tués pour leur peaux, comme dans cette vidéo, que ce soit les arbres que l’on abat à tour de bras, ou bien les peuples qu’on laisse mourir sous les bombes ou qu’on laisse mourir de faim, il est quand même bien difficile de croire que nous respectons le vivant. Or, il y a une citation qui dit, de façon très pertinente à mes yeux, que le degré d’évolution d’une société se mesure à l’aune de la manière avec laquelle elle traite les animaux, donc le vivant en général (au-delà de nos semblables humains, tant il semble acquis qu'une société évoluée ne tolère pas la mise à mort de ses propres congénères, mais passons). Cette citation fait partie des milliers de citations bien tournées qu’on lit un peu partout sur le web, qui suscitent vite fait un acquiescement mental et puis qu’on oublie complètement quand on est devant la vitrine d’une boutique de fringues ou devant le rayon boucherie d’un supermarché. Personnellement, je ne comprends pas comment on peut se vanter de notre avancée technologique, de notre développement esthétique, de notre raffinement occidental, gastronomique, vestimentaire, urbain, intellectuel, etc… quand on sait que le socle sur lequel repose notre « richesse » est une industrialisation hypermassive de la mort. Mon propos, ici, n’est pas de susciter la colère ou d’entretenir l’impuissance ou la victimisation, toutes trois hypermassives elles-aussi, surtout en France où on est les champions de la victimisation, mais plutôt d’encourager un « dessillement » que je voudrais, pour le coup, hypermassif… Qu’on prenne conscience. Je ne pense pas exagérer quand je compare notre façon industrielle de traiter le vivant à la façon dont on a exterminé des millions d’êtres humains pendant la seconde guerre mondiale dans des chambres à gaz. Le nœud du problème, pour moi, c’est l’industrialisation. Ce procédé massif repose forcément sur l’inconscience, nourrie elle-même par une opacité sur le fonctionnement dudit procédé. On ne tue plus un animal en conscience et dans le respect, comme on pouvait le faire jusque dans les années 50 et comme cela se fait encore ici et là, mais on en tue des milliards sur des chaînes de montage. On abat les arbres par milliers à la cadence d’un essuie-glace. On jette près du tiers de ce que l’on cultive sous pesticides, enfin bref. La nature et le vivant sont réifiés, chosifiés, exploités, comme du plastique, sacrifiés sur l’autel de notre toute- puissance rationnelle, habillée d’une blouse blanche dans les couloirs aseptisés des laboratoires et des centres de recherche. On piétine la vie. On la dissèque, on la synthétise. On la fait en mieux. Pour l’exemple, je voudrais citer un fait qui me touche de près et qui concerne l’herboristerie : en 1941, on a supprimé le diplôme d’herboriste en France car on jugeait dépassé le fait de se soigner par les plantes… Aujourd’hui, il est illégal d’être herboriste. La pharmacie est devenue seule légitime en la matière. La science, qui se voulait à l’origine être connaissance inconditionnelle du vivant, est devenue majoritairement exploitation du vivant. Heureusement cependant que certains scientifiques restent fidèles à leur vocation originelle.


L’industrialisation repose sur l’inconscience, le détachement, la rupture du vivant. Il est temps de déssiller, oserai-je dire. Alors le dire, me direz-vous, c’est bien beau, mais que faire ? Concrètement ? Eh bien encore une fois, c’est par notre consommation responsable que nous pouvons agir. TOUT REPOSE SUR NOUS, LES CITOYENS. Il ne s’agit pas de devenir végétarien ou végan, absolument, mais de développer notre responsabilité, de cesser d’être dans le déni et la facilité qu’entretiennent les médias mainstream comme la télé et notre éducation. Il s’agit de consommer moins et consommer mieux, sur la base d’une information qu’on accepte de prendre en considération et d’intégrer profondément et quotidiennement, aussi dure que soit cette information, même si elle bouleverse notre confort mental, sans succomber pour autant au sentiment d’impuissance et de dégoût que cette information est susceptible d’engendrer. La solution existe et elle réside dans les termes «consommer local, naturel, de saison, et avec modération », que ce soit pour l’alimentation, les fringues, les babioles ou que sais-je. Chaque acte de consommation devrait répondre à la question : qu’est-ce que je cautionne en achetant cela ? Pensez aussi que tout ce qui relève des nouvelles technologies repose sur l’exploitation de ressources minières très rares et précieuses. Les scientifiques dénoncent tous les jours les méfaits causés par l’utilisation outrancière des écrans et des technologies sans fil, en tartinant des lignes sur le délitement du lien social que cela engendre, sur le ralentissement du développement cognitif chez les enfants, etc… Les méfaits de la sédentarité causés par notre engouement pour le moindre effort rendu possible par ces mêmes technologies qui nous font miroiter une sorte de puissance. Mais nous ne sommes pas puissants. Nous sommes inconscients et nous passons à côté de l’essentiel. La consommation de masse et les concepts surfaits de croissance et de richesse ont annihilé notre capacité naturelle d’empathie envers tout le vivant non-humain, empathie qui se trouve canalisée dans les séries télé, au mieux, quand elle n’est pas tout bonnement étouffée sous les élans d’un égo narcissique que notre éducation nourrit démesurément en nous faisant croire que c’est en devenant quelqu’un de socialement établi dans le système qu’on a « réussi », que c'est en portant un sac Louis Vuiton ou un montre Rolex qu'on est un humain de valeur. On ne veut plus « s’écouter » car tout ce qui vient de nous, de notre spontanéité émotionelle sont des atermoiements primitifs qui nous éloignent de la réalité, des rêves d’enfants, des utopies, des folies, et l’on devient prétendument réaliste en tuant notre élan intérieur. Le plus beau doigt d’honneur qu’on puisse faire à cette société meurtrière, c’est de choisir de devenir soi, de reprendre les reines de son existence, de mettre de la conscience dans ses actes de consommation, de recouvrer sa souveraineté, de dire non à tout ce système, silencieusement avec son porte-feuille, de dire non haut et fort en partageant les informations qui nourrissent la prise de conscience, de développer des relations humaines avec ses collègues et ses amis qui soient sincères quitte à perdre la face auprès de certains, dans la bienveillance, dans la conscience, dans le respect de ses convictions, d’être cohérent entre ses pensées et ses actes, au quotidien. Beaucoup de mes amis et même ma famille proche sont, comment dire, parisiens ou dans le système, et ils doutent profondément du fait que les choses puissent changer. Ils sont défaitistes, faiblement enjoués de temps à autres, et ils s’interdisent d’être joyeux quand ils pourraient l’être car tout est trop moche et triste, et c’est trop tard, on peut rien faire, qu’ils disent. Mais beaucoup de mes amis sont de l’autre côté et voient quotidiennement que les choses changent à une vitesse inespérée, notamment parce que leurs sources d’information ne sont ni la télé ni la radio. Alors peu importe votre optimisme ou votre pessimisme, les choses bougent et elles vont s’accélérer dans le bon sens. Ce qui importe, c’est de déssiller, d’agir, de changer un peu sa façon de vivre au quotidien en acceptant de croire, au-delà du sentiment d’impuissance qu’on ressent forcément aujourd’hui, que ça peut changer, même si on ne voit rien. Chaque acte de consommation consciente et responsable a un impact beaucoup plus important que le fait de voter aux élections. On consomme plusieurs fois par jours et on ne vote qu’une ou deux fois de temps en temps… Les politiques sont beaucoup plus impuissants que nous, population. Il faut bien le comprendre, ça. La consommation est l’acte politique par excellence. Peu importe les discours et les mesures politiques. On peut choisir de soutenir, même à demi mot celui qui y croit pour dix, en achetant chez le producteur local qui veut bien faire, même s’il nous vend des betteraves et qu’on aime pas ça, ou bien on peut choisir de dénigrer ces producteurs et de rester dans nos schémas de consommation habituels en allant acheter des tomates en plein hiver à Carrefour, parce qu’on croit pas que quoi que ce soit puisse changer et parce que le progrès, c’est justement de pouvoir manger des tomates en plain hiver… Mais non, les amis. Le progrès, c’est pas ça. Le progrès se juge à l’aune des conséquences globales… Le respect du vivant, c’est le critère de l’évolution. La conscience et la souveraineté de nos actes, c’est le critère du véritable progrès. C’est notre consommation qui cautionne aujourd’hui la société que l’on veut voir advenir demain pour nos enfants. Une consommation consciente et responsable, modérée, locale, naturelle, respectueuse du vivant et de ses rythmes. La consommation, - ou la non-consommation ! - c’est notre arme la plus puissante. Puissions-nous l’utiliser tous de concert, juste pour voir ce qu’on est capable de faire, à notre niveau. Faisons-le juste pour voir. :)
Détermination, enthousiasme et protection du vivant. Réjouissons-nous car il y a beaucoup à faire et beaucoup à inventer. Et il n’est pas trop tard.
Regardez cette vidéo si besoin est, elle est dure mais elle illustre notre façon de concevoir le vivant, sur laquelle repose notre système. Ce n'est pas une exception, une atrocité isolée. LVMH reconnaît avoir travaillé officiellement avec la société vietnamienne ici dénoncée, jusqu'en 2014...

Agissons.

jeudi 8 décembre 2016

"Tout est amour", l'illusion New Age


Je souhaite apporter un petit éclaircissement sur ce qu’on appelle le New Age et qu’on identifie souvent un peu trop rapidement à tout travail spirituel. A l’heure actuelle, il y a une forte ouverture au « bien-être » et à l’ « éveil des consciences » un peu partout dans notre monde capitaliste industriel et cette ouverture s’accompagne de nombreuses méprises, de dangers, d’abus. Ces abus nuisent fortement à l’image de la spiritualité, qui n’a rien à voir avec quelque niaiserie que ce soit, qui est un travail éprouvant, rigoureux, ( nécessaire oserai-je dire:) ) et dont je souhaite présenter brièvement la nature afin qu’on sache chacun de quoi on parle quand on parle de « travail spirituel » et discerner ce qui relève de cette espèce de mythologie New Age. Personnellement, j’ai moi-même considéré pendant des années que la spiritualité déconnectait de la réalité, et je restais totalement hermétique à tout message de paix éternelle, de joie fraternelle, d’amour inconditionnel, et de fleurs violettes. J'ai été hyper rationnelle jusqu'à il y a peu et je considérais la réflexion philosophique comme seule outil spirituel, parce qu'elle reposait sur un exercice de réflexion de la pensée organisée qui pour moi était la plus grande faculté dont disposait l'être humain. La philosophie était mon abreuvoir spirituel, alors même que l'exercice rationnel auquel je me prêtais consistais en grande partie à questionner la pertinence de la rationalité... Mais passons. Certains événements récents ont fait que j'ai choisi d'autres pistes de travail spirituel pour dépasser les limites auxquelles me confrontaient la réflexion purement intellectuelle. Ainsi, je me base sur ma propre expérience pratique et non-intellectuelle, sur mon propre travail alternatif, que j’ai confronté à l’expérience d’autres individus d’origines et de traditions différentes, notamment ces dernières années qui ont été très riches en prises de conscience. Mes propos n’engagent que moi.
C’est parti.

Vous êtes prêts ? Alors notez bien ceci : le travail spirituel, qu’on s’amuse à appeler aussi quête du bonheur, et autres intitulés fleuris new age justement, est un travail SUR SOI, sans besoin de PERSONNE, sans besoin d’AUCUN LIVRE, de rien, de rien et de Rien. Vous entendez une petite pointe d’autorité dans mon texte, presque de l’énervement, mais il s’agit surtout d’enthousiasme car là, dans ce que je viens de dire, qu’on n’a besoin de RIEN, tout est dit. Si vous comprenez cela, je peux clore ici mon article et plier bagage. Mais je vais développer un peu quand même.
La base de la base est d’établir une « connexion » entre la tête et le corps, qui, dans notre société, sont deux choses séparées. Là, il ne s’agit pas de juger, mentalement, si une telle connexion ou déconnexion est bonne ou mauvaise, comme le ferait un discours philosophique, mais il s’agit d’établir PRATIQUEMENT cette connexion. Pour cela on a besoin de deux choses, contrairement à ce que je déclamais plus haut : on a besoin de SOI et de 5 minutes de temps, minimum. Par jour.
La spiritualité, c’est une PRATIQUE et non un DISCOURS, encore moins une IDEE. La spiritualité n'est pas intellectuelle. Autrement dit, la sagesse n'est pas rationnelle.
C’est une pratique personnelle, une rencontre avec soi. Une connexion du corps et de la conscience.
La base de cette pratique c’est la RESPIRATION.
Et comme c'est une PRATIQUE, je vais vous donner simplement le mode opératoire.

On s’assoit sur une chaise, un fauteuil ou au bord de son lit. Sans croiser les jambes, les pieds à plat sur le sol, les bras ballants de chaque côté, les mains posées sur les cuisses, le dos raisonnablement droit, sans forcer la posture, on s’assoit donc NORMALEMENT.

Rien qu’en faisant cela, on a été placer sa conscience dans ses pieds, dans son dos et dans ses mains. On peut aller dans les cervicales et tourner légèrement la tête comme pour enlever quelques tensions. On pose sa conscience dans ces parties de son corps. On peut fermer les yeux. On va placer son attention sur sa respiration. C’est là que le gros de l’affaire commence. On va OBSERVER cette respiration. Sans aucune intention de la modifier et, plus dure encore, sans la juger, sans commenter intérieurement « Je respire fort, trop vite, je remplis pas assez mes poumons, je devrais…. » STOP. Tu te tais car tu ne sais pas. Observe, écoute, découvre ta propre respiration. S’effacer de la sorte, faire taire le « je » est un exercice qui n’est pas évident pour tout le monde. On va regarder comment se passe notre respiration. L’inspiration : est-elle longue, profonde, sonore ou silencieuse ? Quelle partie de mon corps bouge quand j’inspire : la cage thoracique, les épaules, le ventre, est-ce que je sens l’air dans mes narines et dans ma gorge ?

On découvre. Pareil pour l’expiration, on observe. Entre l’inspire et l’expire, le passage est-il fluide, perceptible ? Est-ce que je reste en apnée une seconde, deux secondes ? 

Voilà, on peut déjà passer un certain temps à observer car il y a beaucoup à voir.

Une autre étape de l’exercice consiste ensuite à modifier sa respiration. Inspirer sans bruit, très lentement, et « placer sa respiration dans son ventre », la faire descendre. On remplit le ventre à l’inspire, l’inspire se fond dans le vide avec fluidité, on ne la coupe pas brutalement quand on arrive à son terme, l’expire commence ensuite le plus doucement possible. On essaie de sentir une continuité entre l’inspire et l’expire, dans la douceur et la lenteur. On sent son ventre se gonfler et se dégonfler, et si on a bien fait son travail ( je vous charrie un peu), on devrait certes bailler plusieurs fois, mais aussi sentir quelque chose qui s’apparenterait à de la bienveillance, quelque part au niveau du coeur. Je dis cela je ne dis rien.

Une autre étape de l’exercice que je vous propose, puisque vous êtes demandeur, après avoir placé la respiration dans son ventre, c’est de « poser son sourire dans son ventre ».

Avant de juger de ce que peut être la spiritualité, de la déprécier, de l'intellectualiser, avant de se jeter sur un livre ou sur des cours de yoga, il suffit de respirer, d’observer.

Cela paraît infiniment anodin, voire « trop facile », tellement facile qu’on serait presque déçu de voir que tout le travail ne consiste qu’en cela. Or, si chacun s'exerçait régulièrement à calmer ses pensées (c’est ce qui se passe d’office quand on place son attention sur sa respiration), à entrer en soi aussi simplement que cela, et bien beaucoup de choses seraient différentes en ce bas monde. Mais force est de constater qu’on aime bien que les choses soient compliquées afin de trouver des excuses pour ne pas les faire ou des technologies pour les faire à notre place. Là, faut s’y coller, sans personne, sans aide, juste le faire, tous les jours si possible, plusieurs fois par jour, et pourquoi pas une heure par jour, soyons fous.

Élément crucial que je vous donne maintenant : on ne fait pas un travail tel que le petit exercice que je vous ai proposé en attendant quoi que ce soit de ce travail. Il n’y a rien à attendre et il est indispensable de se détacher des résultats. Le gros du travail en effet consiste à faire ce travail "pour rien". Juste pour "se trouver", quoi qu'on trouve. On peut faire des choses gratuitement, où le « je » n’a rien à gagner (et tout à perdre en fait), tandis que le « soi » a tout à gagner. Il existe une loi universelle qu'on découvre assez tôt quand on commence un travail spirituel, c'est que le "Je" a très souvent peur, alors que le "soi", très profondément enfoui, "aime"... Le "soi" n'a pas peur... Mais ça, je vous laisse le découvrir. Découvrir le "soi", découvrir déjà qu’on a un "soi",  qui est en nous et qui n’est pas le « je » auquel on s’identifie, eh bien c’est une expérience à vivre qui est très forte. Le fait de se détacher des résultats, d'être sans attente, c'est déjà une forme de libération, c'est un détachement de l'égo, du "je" personnifié. Ce qui fait plus de place pour le Soi. C'est mathématique ;) 
Bref.

Dialoguer avec ce soi, dans un travail d’écoute de son intériorité et d’effacement de l’intention, du jugement et du « je », est un travail de toute une vie, quotidien, et un travail spirituel n’est rien d’autre que cela : se connaître. Connaître son soi. Devenir qui on est. Autrement dit, rabattre le caquet de l’égo. Voilà. On retrouve quelques jolies tournures qu’on trouve dans les bouquins de développement personnel, elles sont vraies, mais pas besoin d’acheter de bouquins. Ce n’est pas la lecture qui fait prendre conscience, c’est L’EXPERIENCE et la PRATIQUE. Dans le silence et la solitude.
Contrairement au "je", qui est intimement lié à la matière, à l'intellect, la rationalité, - instruments indispensables pour mesurer notre environnement physique-  le "soi" est relié à autre chose d'immatériel, d'invisible, et de bien plus vaste que la matière. Pour vous donner une idée, le ratio visible/ invisible est de 2% de visible pour 98% d'invisible, avec un invisible infini...

Ensuite, quand on commence à se connecter à ce qu'on est, à son corps, à son intérieur, qu'on rentre chez soi, je ne vous cache pas qu’il se passe des choses, après un certain temps. C’est différent pour chacun, mais il se passe toujours quelque chose. Et là, ce que je vais dire est important et il faut bien le garder à l’esprit :

- il est normal de ne pas comprendre ce qui se passe, au début, ( par exemple des ressentis légers ou forts qui nous traversent sans raison apparente). Ce sont des choses de notre intérieur profond et inconscient qui remontent et leur sens se précise dans le temps.

- il ne peut rien nous arriver que nous ne soyons capables de « gérer », supporter, etc. Et ce que nous vivons est ce que nous avons besoin de vivre pour avancer à une période t. Parfois on peut se sentir destabilisé, voire carrément mal, c’est un fait, c’est normal et il n’y a aucune raison de céder à la panique ou au découragement, ou de tomber dans un jugement dépréciatif, « je n’ai pas la force de…, je n’aurai pas le courage, c’est pas pour moi, etc » STOP. Les blessures non guéries,  que ce soient des deuils, des traumatismes, remontent à la surface d’une façon qui est « la bonne » pour nous, afin que nous puissions les voir et les dépasser, ou les apprivoiser. Nous en sommes parfaitement capables. C’est une étape incontournable dans la connaissance de soi. Notre corps SAIT et si on le laisse faire, il fera sortir ce qui a besoin de l’être (au lieu de le transformer en maladie).

- et surtout : jamais PERSONNE ne peut comprendre à notre place, aucun spécialiste, aucun thérapeute, aucun gourou. On peut avoir besoin d’une aide ponctuelle et se tourner vers une energéticienne, une kinésiologue, un psychothérapeute, qui aidera à faire sortir les choses mais qui ne les fera pas disparaître. C’est la prise de conscience qui calme une blessure. La conscience opère comme un faisceau de lumière qui balaie un coin sombre. Une fois qu’on voit ce qui y est, on peut commencer à faire quelque chose. On ne subit plus les conséquences « invisibles » de cette blessure. C’est une façon de recouvrer la souveraineté de sa personne et d’être responsable, en sachant bien que ce n’est pas le Je qui gouverne, mais le Soi. D’où l’importance d’être à l’écoute de ce Soi et de faire taire le Je.

Voilà . Je vous donne quelques exemples de ce qui peut se passer quand on commence à s’intéresser à ce qu’est un être humain, en commençant donc par soi, par le souffle et la spiritualité n’est rien d’autre que cela.

Le travail sur le souffle qui, je le répète est le premier travail à faire, qui est le départ de toute méditation pour ceux qui sont amenés à aller plus loin, est absolument fondamental pour une autre raison. Il permet ce qu’on appelle l’ancrage et sans ancrage, il n’y a aucun véritable travail spirituel possible.

S’ancrer, c’est s’enraciner. C’est garder les pieds sur terre. On ne peut pas avoir de prises de conscience, donc élargir sa conscience si, de façon symétrique, on ne fait pas un travail sur le corps. Il existe plein de façons de s’ancrer et « respirer dans son ventre » est la première de toutes. Etre au contact de la nature en est un, comme marcher en forêt, soigner son alimentation en est un autre et pas des moindres, et il existe des exercices de visualisations tout bêtes, comme par exemple, imaginer, sentir, voir son dos devenir un arbre, puis imaginer, sentir et voir des racines qui partent de la plante des pieds pour plonger dans la terre, se multipliant, s’entrecroisant, se démultipliant, se mêlant aux racines d’arbres voisins, et plongeant toujours plus loin dans la terre, jusqu’à son centre. Imaginer, sentir et voir ensuite la sève remonter dans nos racines, lentement, dans tout le réseau de nos racines, croisant les racines des arbres voisins, sentir cette sève entrer dans notre corps par la plante des pieds et monter en soi…

Les exercices de visualisations qui semblent simples et anodins font beaucoup plus que le « je » ne peut en juger. Il ne faut pas les négliger. Nous ne savons pas comment fonctionne l'esprit, et ce qui semble simple, anodin, sans conséquence, est peut-être infiniment plus complexe qu'il n'y paraît.

Le New Age fait souvent l’impasse sur l’ancrage. Ainsi les gens manquent de discernement et boivent des « vérités » dont ils ne savent d’où elles viennent. Ils veulent vivre des expériences fortes, fuir la réalité, que sais-je. La spiritualité, ce n'est pas FUIR, mais se CONFRONTER. Ca demande du courage et de la responsabilité.
C'est affronter ses peurs les unes après les autres. Mais pas les peurs dont on a conscience et qui ne sont que les parties émergées de notre conscience, les peurs enfouies dans notre inconscient et qui peuvent être bien plus noires qu'on ne pourrait l'imaginer. Sauf que, et c'est bon à savoir, toutes les peurs sont des illusions... Des nuages de fumée noire qui disparaissent d'un coup dès lors qu'on les identifie, qu'on les regarde en face. Toutes. Il n'y a pas d'exceptions. C'est vrai. C'est aussi simple que cela. Il faut du courage et c'est tout. Et qui dit courage dit coeur, et en effet, ce qui vient du coeur est plus puissant que ce qui vient de l'égo et de la peur. Mais rien ne vaut le fait de découvrir cela par soi-même.

Cela dit, tout travail spirituel s'accompagne nécessairement d'un travail d'ancrage. Un arbre sera d'autant plus haut, grand et large qu'il aura des racines puissantes et profondes puisant dans la terre la force de s'élever. 
L’ancrage, qui se travaille régulièrement, qui n’est jamais acquis – faut pas rêver- permet de garder les pieds sur terre, d’aiguiser le discernement, d’affiner un petit curseur intérieur qu’on peut appeler intuition, qui n’est pas un jugement conditionné du « je » et qui vient de bien plus profond. C’est ce discernement qui nous permet de sentir la résonance de certains propos qu’on pourra lire ou entendre. Discerner ce qui est juste pour soi et ce que ne l'est pas. Le discernement, ce n'est pas la raison. C'est autre chose et parfois, c'est insensé.
Cependant, il faut FAIRE CONFIANCE à son discernement. C’est un principe indiscutable. Il faut développer cette confiance en son discernement, et cela prend du temps, mais c’est un des apports principaux du travail spirituel. Personne ne peut savoir mieux que nous qui nous sommes. 
Cela n’empêche évidemment pas la pratique en groupe, entre amis, ni de bénéficier de la guidance de quelqu’un sur un temps, le temps d’intégrer une information ou de développer une perception, nettoyer un parasitage, etc. Parce que parfois, il peut y avoir un décalage énorme entre notre ressenti profond et ce que nous dit notre mental, qui va juger ce ressenti comme une abérration, et il n'est pas exclu qu'on se perde entre raison et ressenti. On a toujours besoin des autres...  Avec discernement.

Quand on entend dire que « tout est amour », avant de se moquer de ce genre d’assertion ou avant de se jeter dessus à la hâte, il faut se taire et respirer. Revenir à son corps, rentrer à la maison, allumer la lumière dans toutes les pièces. S’effacer, se découvrir, apprendre à s’accepter tel que l’on est, sans juger, avec sa noirceur, ses casseroles, ses faiblesses, ses qualités, sa naïveté, que sais-je, s’accepter tel que l’on est, sans se prendre ni pour moins que ce que l’on est, ni pour plus. 

A ce stade, on est au tout début d’un travail spirituel. Le voyage que l’on peut être amené à entreprendre ensuite est imprévisible, surprenant, infini, passant par des bribes de vies antérieures, amenant à développer des perceptions extrasensorielles et contacter l’invisible, (ce qui n’a rien d’exceptionnel et qui est au contraire normal, qui fait partie de notre patrimoine à chacun) mais toujours, la spiritualité nous ramenera sur terre, ici, dans notre corps auprès des gens qui nous sont chers car c’est avant tout ici que l’on est, dans cette réalité, et c’est dans cette réalité que toute existence doit être menée, en soignant son corps, en pratiquant son corps, par la technique et l’expérimentation. Ce quel que soit son niveau de conscience.

La spiritualité c’est une technique qui nous permet de devenir fondamentalement qui on est. On n’a besoin de rien pour y parvenir. Que de bonne volonté. La spiritualité, ce n’est pas le contenu du voyage ou de l’expérience méditative, qui est toujours relatif à la personne et à un « moment », que personne d’autre que soi-même ne pourra interpréter, rmais c’est l’ensemble de règles simples à suivre qui permettent cette expérience . Respiration, ancrage, détachement des résultats, confiance en son discernement, confiance en son Soi.
Plus tard encore on pourra voir qu’il y a des règles dans la Vie, comme le libre-arbitre, la loi de l'un ou la loi de l’attraction, ou le fameux « tout est amour », car c’est vrai, tout est amour, mais cette phrase n’a rien à voir avec ce que le sens commun comprend. L’amour est une science vraiment complexe, une vibration très élevée, qui n’a rien de naïf, qui est bien au-delà du bien et du mal, et qui commence dans le souffle. La respiration. Le courage, la confrontation. Puis qui passe par la conscience et la lumière, la connaissance du Soi.